Qui est Victor Fay ?

Victor-Fay-portraitInconnu du grand public, même au sein du milieu universitaire, il est pour beaucoup de militants et d’historiens du mouvement ouvrier une « légende ». Armand Ajzenberg, philosophe, vice-président de l’Association des amis de Victor et Paule Fay et ancien élève de Victor Fay dit de lui : « Imaginez la perplexité, et la curiosité, d’un modeste militant à l’idée de rencontrer une légende (…) avoir été l’un des fondateurs des Jeunesses Communistes en Pologne dans les années vingt, s’être expatrié en 1925 pour échapper à la prison et devenir, en France et en 1929, responsable de la formation des cadres du PCF, chroniquer à L’Humanité et collaborer avec d’autres publications communistes … Avoir été l’un des dirigeants actifs lors des grèves du Nord, y découvrir une jeune fille courageuse et combative dénommée Jeanne Vermeersch, et plus tard, être l’agent innocent de sa rencontre avec Maurice Thorez… Avoir formé politiquement une certaine Danielle Casanova mais aussi un certain Jean-Pierre Timbaud … Avoir découvert, encore, un horticulteur hors du commun : Waldeck Rochet, cela relève de l’histoire et déjà de la légende 3».

Cette description n’est pas tout à fait exacte et vraisemblablement subjective. Elle est cependant représentative de l’image que certains se font du personnage. Il faut rajouter que par la suite, Victor Fay, jugeant sectaire la politique du PCF et de l’Internationale communiste (IC), participe, avec d’autres membres du parti comme André Ferrat et Georges Kagan, à un mouvement de contestation interne au sein du parti et à la création d’une revue d’opposition : Que faire ? Il quitte le parti en 1936 à la suite des Procès de Moscou, procès truqués organisés par Staline afin d’éliminer une partie des anciens bolcheviks, et adhère à la SFIO sans grande conviction l’année suivante. Il joue un rôle non négligeable dans la Résistance pendant la Seconde guerre mondiale, entre Marseille, Toulouse et le Chambon-sur-Lignon en Haute-Loire. Commence alors pour lui une période d’intense activité journalistique. Il est le rédacteur en chef du journal clandestin L’Appel de la Haute-Loire puis de Lyon Libre, organe du Mouvement de Libération nationale dont le directeur est son ami André Ferrat. Il est ensuite rédacteur en chef de Combat, journal fondé pendant la guerre par des résistants, jusqu’en 1950. Il travaille à partir de 1952 pour la Radio Télévision Française (RTF) qui devient l’Office de radiodiffusion télévision française (ORTF) au service des émissions à l’étranger. Il adopte une attitude très critique au sein de la SFIO et représente, avec Oreste Rosenfeld, militant SFIO d’origine russe, une minorité d’extrême gauche, qui, après le ralliement du secrétaire général de la SFIO Guy Mollet à Charles de Gaulle, quitte le parti pour créer le Parti Socialiste Autonome en 1958. Engagé dans la construction du PSU, il est responsable des écoles et des séminaires du parti. Il entre en 1964 au Bureau national. Après l’arrivée de Charles de Gaulle au pouvoir, il est rapidement interdit d’antenne à l’ORTF : ses propos dérangent. Il demande son renvoi et l’obtient en 1967. De 1968 à 1980, à la retraite, il reste un militant actif au PSU et conserve une tribune mensuelle dans Le Monde diplomatique, revue d’information et d’opinion où il écrit des chroniques sur l’Europe de l’Est et les Partis communistes d’Europe occidentale, collabore à la Quinzaine Littéraire, revue de critique littéraire, et assure également la rédaction d’Action. Il meurt le 29 juin 1991 à Créteil.

(Texte extrait du mémoire de Master II de Marion Labeÿ)